Quand le fait divers devient enquête romanesque
L’étincelle d’un roman peut parfois surgir d’un fait divers, une brève incursion de la réalité dans le flux tranquille de nos vies. Pour « Le Puits des Âmes », paru chez Horizon Libre, cette étincelle a jailli d’un événement qui a marqué la Suisse et les esprits : le spectaculaire hold-up de l’Union de Banques Suisses (UBS) à Genève, le 25 mars 1990.
Ce dimanche matin-là, un audacieux cambriolage se déroulait au cœur de la cité de Calvin. Quatre malfaiteurs parvenaient à subtiliser une somme colossale de 35 millions de francs en devises étrangères, un véritable pactole de 200 kilos de billets. Le plus stupéfiant dans cette affaire ? Aucune trace d’effraction, ni sur les coffres, ni sur le système d’alarme. Un mystère qui a alimenté les conversations et les spéculations pendant des mois. Si les voleurs furent par la suite appréhendés, le butin, lui, s’est volatilisé, englouti par les méandres du secret.
C’est précisément cette énigme, cette absence de résolution, qui a semé la graine de mon roman. Et si cet argent, fruit d’un audacieux coup d’éclat, n’avait jamais quitté la région ? Et si le cerveau derrière ce braquage se cachait dans les paisibles environs de Mont-sur-Rolle, là où je vis ? Cette simple question a suffi à enflammer mon imagination, mais avec une orientation différente : et si un journaliste local flairait cette piste ?
C’est ainsi qu’est né Marc Dufour, le héros du « Puits des Âmes ». Non pas le voleur, mais un journaliste perspicace, travaillant peut-être lui aussi à la RTS comme j’ai pu le faire, dont l’instinct le pousse à creuser cette affaire non résolue. L’idée d’ancrer une enquête aussi retentissante dans le décor que je connais bien, de mêler le tumulte d’un braquage genevois à la sérénité de La Côte, a immédiatement résonné en moi. Et si le cerveau derrière ce coup magistral n’était pas un criminel venu d’ailleurs, mais un habitant discret de Mont-sur-Rolle, devenant ainsi la cible de l’enquête de Marc ?
Pour étoffer le récit et donner de la profondeur à l’enquête de Marc, j’ai imaginé son passé, ses relations. L’idée d’intégrer ses amis d’enfance est rapidement apparue comme une évidence. Ces liens tissés au fil du temps, ces connaissances du tissu local, deviennent des atouts et des obstacles potentiels dans sa quête de vérité. Ces retours en arrière, ces scènes de flashback, éclairent la personnalité de Marc, ses motivations et la manière dont il aborde cette enquête délicate.
L’enquête policière initiale, bien sûr, reste un élément crucial. J’ai intégré un policier genevois dans le récit, dont la carrière évolue au fil des ans jusqu’à devenir chef de la police cantonale. Ce personnage représente l’enquête officielle, celle qui a eu lieu à l’époque, et offre un contraste intéressant avec l’investigation plus personnelle et obstinée de Marc. Leurs chemins se croisent-ils ? Collaborent-ils ou se font-ils concurrence dans la recherche de la vérité ?
« Le Puits des Âmes » devient ainsi un thriller où un journaliste local se lance sur la trace d’un mystérieux braqueur dont le butin n’a jamais été retrouvé et qui pourrait bien se cacher sous le vernis tranquille de Mont-sur-Rolle. C’est une exploration des secrets d’une communauté, des liens entre les habitants et de la manière dont un événement passé peut continuer à hanter le présent. La genèse de ce roman est un voyage entre les archives d’un fait divers retentissant et les ruelles discrètes d’un village au bord du lac Léman, un voyage où la réalité sert de point de départ à une enquête captivante menée par un journaliste déterminé.